San Vũ Ngọc

San Vũ Ngọc, enseignant-chercheur à l'Institut de recherche mathématique de Rennes (IRMAR) et responsable de projet « Centre de Mathématiques Henri Lebesgue »

Crédit photo : Caroline Ablain

En quoi consiste le projet du centre de mathématiques Henri Lebesgue ?

Il s'agit de créer un centre de recherche et de formation en mathématiques dans le Grand Ouest. Aujourd'hui, plus de 200 chercheurs français et étrangers dont certains très reconnus, planchent sur les mathématiques dans les laboratoires de Rennes, Nantes, Brest ou Angers sans compter les étudiants en thèse. Cette richesse en matière grise est encore trop peu connue en France et à l'étranger. La création de ce centre permettra de fédérer la recherche et de susciter de nouvelles collaborations dans toutes les disciplines : géométrie, algèbre, analyse, statistique, probabilités... Elle rendra nos travaux plus visibles au niveau national et international en nous alignant sur la taille des meilleurs laboratoires de mathématiques en France comme ceux de Jussieu ou d'Orsay.

Qui sera associé au centre de recherche ?

Le projet s'appuie sur l'Institut de recherche mathématique de Rennes (IRMAR), le laboratoire de mathématiques Jean Leray de Nantes et le département de mathématiques de l'ENS Cachan (Bretagne). L'équipe de l'INSA et les statisticiens de Rennes 2, de l'ENSAI et d'Agrocampus qui font partie de l'IRMAR, se joignent également au projet avec plusieurs équipes de l'INRIA et de la DGA. Nous envisageons d'intégrer à terme les laboratoires de Brest et Angers qui sont, comme les laboratoires rennais et nantais, associés au CNRS. Quelles seront les spécificités du centre de recherche par rapport aux autres laboratoires français ?

La plupart des laboratoires sélectionnés en mathématiques dans le cadre des investissements d'avenir sont associés à d'autres matières comme la physique ou l'informatique par exemple. Notre démarche est un peu différente. Nous allons nous concentrer sur la recherche mathématique dans l'idée que nos avancées irriguent les autres disciplines sans restriction. Les besoins en mathématiques sont de plus en plus importants comme en statistique pour traiter des quantités d'informations très complexes. En biologie et en sciences de la mer, il faut élaborer des modèles mathématiques avant de calculer les données météorologiques ou les mouvements marins. En informatique, la protection des données sur internet a besoin de la géométrie algébrique. Notre comité scientifique lancera des appels à projet sur les sujets qui jouent un grand rôle dans la science, la technologie et la culture comme la mécanique quantique, la mécanique des fluides, les probabilités ou l'étude des polymères.

Votre projet prévoit une plus grande ouverture sur l'entreprise. Quelles actions allez-vous mener dans ce domaine ?

Un chef d'entreprise qui a un besoin en calculs mathématiques se tourne souvent vers les ingénieurs ou les informaticiens. Il n'a pas le réflexe de faire appel à des mathématiciens. C'est probablement lié au parcours des chefs d'entreprise eux-mêmes. Nous voulons mieux faire connaître notre discipline et partager notre expertise avec l'industrie et les entreprises technologiques en organisant des journées maths-entreprises. L'idée : monter des expositions de nos résultats scientifiques et organiser des tables rondes avec les industriels pour mieux comprendre leurs besoins et les inciter à soutenir la science fondamentale.

Que proposera le centre de recherche pour les étudiants ?

Le projet est étroitement lié au développement d'une offre de formation exceptionnelle incluant un collège doctoral. Dès le printemps 2013, nous organiserons des semestres thématiques à la pointe de la science mathématique. Le principe : sélectionner un domaine et orienter toutes nos actions en fonction de ce choix : conférences internationales, invitation de chercheurs à dispenser des cours aux étudiants... Nous proposerons aussi dès la rentrée 2012 des bourses de thèse, mais également des bourses pour les meilleurs étudiants en master recherche, une initiative inédite dans l'enseignement supérieur universitaire.